Le MODGEAU, MODèle Géologique pour la gestion des ressources en EAU

Contexte

Un peu d’histoire géologique…

Dans la partie sud-ouest du Bassin Parisien, la première reprise de sédimentation sur le socle varisque date du Trias (– 251 à – 200 millions d’années), le massif armoricain étant alors soumis à une puissante érosion alimentant des bassins continentaux en position plus aval.

A l’affleurement, les premiers dépôts sont datés du Lias. A partir de cette époque et durant le Jurassique (– 200 à – 145 millions d’années) et le Crétacé (– 145 à – 65,5 millions d’années), les dépôts se succèdent sur la bordure du Massif armoricain dans cette partie ouest du Bassin de Paris au gré des variations relatives du niveau de la mer. Ces cycles de transgression/régression enregistrent les influences des événements géodynamiques des domaines atlantique et téthysien (Guillocheau et al., 2000).

Ainsi, dans cette partie du Bassin Parisien, les formations sédimentaires - issues de dépôts en contexte de bordure - sont complexes. Ces formations, en particulier celles du Jurassique et du Crétacé, présentent un intérêt particulier également sur le plan hydrogéologique puisqu’ils renferment les réservoirs aquifères les plus vastes de ce secteur géographique et concentrent de forts enjeux en terme d’approvisionnement en eau.

Les limites de connaissances et les enjeux

En Pays de la Loire, ces formations ont fait l’objet d’études au cours des années 1980 et 1990 Ces études basées sur une approche principalement lithologique ont permis d’établir un bon cadre litho-biostratigraphique. Par ailleurs, avec le développement des pratiques culturales et de l’irrigation, de nombreux forages ont été réalisés depuis le début des années 90 apportant un lot d’informations nouvelles, véritable ressource de données pour l’amélioration des connaissances.

Sur le plan hydrogéologique, les grands aquifères sédimentaires que renferment les formations du Jurassique, du Cénomanien, du Turonien et du Sénonien n’avaient pas fait l’objet de modélisation d’ensemble en Pays de la Loire. Pour la gestion des ressources en eau souterraine, il en découle les limites suivantes :

  • Les géométries et les interactions entre ces aquifères ne pouvaient alors être cernées alors que, par exemple, la question des relations existantes entre l’aquifère du Cénomanien et celui du Turonien se pose dans certains secteurs (en Sarthe, en Maine-et-Loire mais aussi en Touraine).
  • Les zonages réglementaires étaient délimités mais les profondeurs des aquifères avaient été évaluées de façon peu précise ou n’avaient pas pu être définies. Ainsi la protection recherchée par ces zonages n’était pas forcément effective et l’instruction des dossiers au titre du Code de l’environnement posait souvent problème.

Ainsi, la nécessité d’améliorer la connaissance afin de mieux gérer les ressources en eau souterraine était affichée comme une orientation dans le SDAGE Agence de l’Eau Loire Bretagne 2016-2021.

Cadre et objectifs du MODGEAU

Dans ce contexte, le projet de recherche MODGEAU, cofinancé par l’AELB, a été réalisé par le BRGM afin de mieux comprendre la géométrie des grands ensembles aquifères de la partie Ouest du bassin de Paris et leurs interactions possibles. L’objectif principal était d’améliorer les connaissances sur la géométrie (extension, biseaux connexion entre aquifères multicouches) des aquifères du Jurassique et du Cénomanien qui concentrent les réservoirs aquifères les plus vastes de cette zone, avec une approche de type stratigraphie séquentielle.

Vue Nord Sud Céno

Légende Formations MODGEAU

Les travaux se sont déroulés en plusieurs étapes :

  • Une phase massive de collecte et de valorisation des données auprès des opérateurs et bureaux d’étude ayant conduit à enrichir de façon substantielle les bases de données nationales et constituant un véritable socle de travail pour la phase d’étude géologique ;
  • Une phase de synthèse de bassin sur les dépôts jurassique et cénomanien, incluant des travaux de terrain avec identification des principaux environnements de dépôts ; la reconstitution des géométries par corrélations diagraphiques (stratigraphie séquentielle) ; la synthèse des données chrono-lithostratigraphiques (diagrammes de Wheeler) ; l’harmonisation de cartes géologiques sur la base de ces diagrammes ; une compilation des données structurales, permettant de disposer d’un schéma structural synthétique et représentatif des accidents majeurs.
  • La conception et la réalisation d’un modèle géologique 3D accompagné d’une base de données, interrogeable et actualisable.

Résultats

Les principaux résultats de cette étude, retranscrits partiellement par le modèle géologique 3D sont :

  • Pour le Cénomanien, aquifère le plus sollicité et le plus renseigné par des données de forages : la distinction de quatre aquifères sableux, correspondant à des édifices deltaïques successifs. La géométrie et la paléogéographie de ces ensembles, identifiés à l’affleurement mais dont la géométrie en profondeur était mal contrainte est restituée par les corrélations et des cartes paléographiques successives. Ces précisions géométriques amènent à redéfinir les ensembles aquifères de BDLISA en 3D, et permettront à terme de modéliser de façon réaliste les circulations hydrauliques dans ces aquifères complexes.
  • Pour le Jurassique, l’étude confirme l’existence d’un aquifère Bajo-Bathonien, recouvert par une rampe argileuse du Callovo-Oxfordien puis par un aquifère oxfordien. Un grand nombre de séquences ont été corrélées et permettent de recomposer précisément l’évolution paléogéographique de la zone. Cependant la rareté des forages atteignant le Jurassique n’a pas permis la modélisation 3D.

Le MODGEAU est consultable via l’espace cartographique du SIGES Pays de la Loire.

Perspectives

Les résultats du projet MODGEAU pourront permettre de faire évoluer la délimitation des zonages réglementaires, les référentiels.

Le projet MODGEAU vise à établir un modèle géologique patrimonial. Ainsi, les résultats peuvent être extraits pour un secteur donné afin de servir de base aux études incluant la géologie et l’hydrogéologie. Les travaux de reconnaissance qui pourraient être réalisés, bancarisés en Banque de données du Sous-Sol (BSS) permettront d’enrichir la connaissance et ce modèle patrimonial.

Le MODGEAU est un modèle évolutif. Ainsi, la géométrie des ensembles sédimentaires pourra être affinée avec de nouveaux jeux de données (coupes de forages non prises en compte à ce stade, diagraphies et coupes de nouveaux forages). Ces travaux permettraient d’établir une nouvelle limite afin de délimiter l’aquifère du Séno-Turonien (ressource d’importance régionale) mais aussi de préciser les limites existantes.

En complément des informations géologiques, des informations d’ordre hydrogéologique permettrait d’enrichir nettement la connaissance patrimoniale utile à la gestion des ressources en eau souterraine tant sur l’aspect quantitatif que qualitatif. Ainsi, afin de devenir ce véritable outil pour la gestion des ressources en eau, un travail portant sur les caractéristiques hydrogéologiques, sur les interactions entre les aquifères permettrait de mieux caractériser chaque entité définie dans le MODGEAU sur le plan hydrogéologique.

Pour en savoir plus :

  • Webinaire « Outils MODGEAU et SIGES pour la gestion des eaux souterraines en Pays de la Loire » : lien d’accès
  • Rouxel E., Lasseur E., Baudouin V. et al. (2020) - ModGeau : Synthèse et Modélisation géologique du mésozoïque de Sarthe et de Maine-et-Loire, pour une gestion améliorée des ressources en eau - Rapport final. BRGM/RP-70301-FR
Publié : 2021

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